10 septembre 2013

Exil au pays de la Pucelle

Voila c'est fait. Enfin j'ai passé cette année d'exil sur les bancs de l'école. Pas facile de reprendre les cours quand on a 35 ans, pas mal de bouteille et pas forcément les même attentes que des étudiants 10 ans plus jeunes.
Reste à dresser le bilan de cette parenthèse scolaire où j'ai parfois dû serrer les dents bien bien forts. A 20 ans, je n'avais qu'une seule idée en tête: quitter l'univers des donneurs de leçon et entrer dans la vie réelle.
Oui mais voila, en France plus qu'ailleurs, les plafonds de verre existent. Les élites sont éduquées dans l'esprit écœurant des castes. En Nouvelle Calédonie, j'avais eu la mauvaise idée d'enfreindre une règle que je m'étais fixé pour une qualité de vie meilleure. Mauvaise idée! J'allais nécessairement me heurter à ce que l'on peut appeler la médiocrité de certain(e)s. Alea jacta est! Retour dans l'univers déprimé français puis vers les bancs de l'université. Au programme: deux master: l'un en exploration minière, l'autre en hydrogéologie/eau souterraine... Me voici entré dans la maladie de la diplomite aiguë!
Orléans est une ville de province de taille moyenne chargée d'histoire (catholique et royaliste...) et à proximité de Paris: à peine plus de 100 km au Sud. Autant dire qu'il était très tentant de rejoindre la ville lumière et que cette ville est une ville dortoir molle où bons bourgeois et quartiers populaires sont bien séparés.
Je suis logé à la Cité Universitaire de La Source, une sorte de ghetto populaire excentrée du centre ville situé à près de 10 km: on ne mélange pas les torchons et les serviettes à Orléans. Une bizarrerie La Source car ce bout de territoire forme comme un appendice. C'est au fait un morceau de la commune de Saint Cyr en Val qui a été racheté par Orléans dans les années 1960. On y a aussi envoyé l'université

Bref suivre des cours à 35 ans n'est pas facile. On y rencontre des jeunes qui croient déjà tout savoir sans avoir quitter le banc de la fac. J'ai adoré un moment où un jeune m'expliquait le métier de géologue d'exploration...
Il faut que je me souvienne que j'ai été jeune moi aussi (il y a fort longtemps) et que j'écumais les bars. Il faut comprendre la jeune génération qui a qu'une seule envie: boire plus que de raison à dépenser une fortune. Bref le cocktail des adulescents.
On y rencontre des professeurs intéressants, d'autres beaucoup moins, le monde de la recherche étant tellement remplie de susceptibilités mal placées. Finalement aucune tête ne doit dépasser et il est préférable d'être dans la même ligne scientifique du maître. Pas trop se mettre en avant sinon pan pan! L'idiotie parfois: quel est l'intéret de tester les nuits blanches quand on est déjà à un niveau d'études avancées et que les travaux demandés paraissent complètement inutiles au regard de ce qui est demandé dans la profession. Encore faut il savoir ce que demande la profession et je suis assez certains que peu d'entre eux ont déjà passés ne serait ce que quelques jours dans un camp d'exploration minière.

Je dresse peut être un tableau noir de la reprise d'étude mais il n'en est rien. Je n'y ai pas trouvé ce que j'y attendais mais j'y ai trouvé d'autres choses. Déjà la remise en cause: remise des compteurs à zéro.
Ensuite la stimulation de la curiosité intellectuelle. On regarde la connaissance avec le regard d'un professionnel, c'est à dire avec un certain regard critique ce qui permet de comprendre très rapidement les enjeux et les applications, et compléter sa boite à outils. On remet en cause ses idées préconçues. Encore pleins de nouvelles idées à mettre en applications aux 4 coins du monde pour clouer le bec des conservateurs technologiques et s'ouvrir de nouvelles portes professionnelles
On prend aussi un petit coup de jeune. J'ai l'air vieux maintenant: j'ai pas mal de cheveux blancs mais je pense avoir encore le dynamisme de quelqu'un qui n'a pas encore 30 ans.
Il y a aussi la fierté d'avoir démontrer que l'on est aussi bon que les autres. Fierté pour soi même dans un univers français où l'on cherche sans cesse à abaisser l'autre et non pas tirer ces camarades vers le haut. Pas de chance, la flamme ne s'éteint pas comme ça. Pire, les difficultés stimulent le challenge et poussent les plus résistants vers le haut (et malheureusement les plus faibles vers le bas).

D'Orléans je garde le souvenir d'une excellente équipe de rugby folklo. Les Indiens de la Source. Excellente ambiance, excellent club house avec ses bonnes bouffes et le vin et la bière qui coulent à flot. Une excellente bouffée d'oxygène quand tout ne va pas bien comme au coeur de cet hiver estudiantin.... On chante bien  moins qu'avant au rugby mais ça reste quand même très agréable pour décompresser de la pseudo-intelligensia. Et le 7e jour, Dieu créa le rugby
L'équipe des Indiens de la Source avec un type bizarre en jaune au premier rang

Le parc Floral de de La Source est une autre belle surprise de la source. Je l'ai malheureusement découvert tardivement. Un parc payant, enfin 13 € l'année, qui permet d'avoir un d'avoir un endroit bien entretenu, calme et propre. La particularité du parc est une résurgence de la Loire, la source du Loiret, et un chateau où Voltaire aurait trouvé l'inspiration pour écrire Candide. En attendant, à la sortie des cours tandis que d'autres stressaient, je me délectais à l'ombre de MON arbre vautré dans un coussin géant à lire des livres de science fiction


Mon arbre et mon coussin au Parc floral de la source

Cette année difficile est passée. Finalement le bilan n'est pas si mauvais et c'est un challenge comme un autre mais si parmi vous, vous connaissez des jeunes qui veulent reprendre leurs études, dites leur de ne pas trop tarder au risque de ne pas pouvoir pleinement profiter de la vie étudiante.
Bientôt une nouvelle tranche de vie dans l'ouest canadien. Ma carcasse commence à se faire vieille mais goût de la révolte et de l'aventure n'est pas complètement enterré! Amen